Publiée le 01 Août 2010
Voici une recette de vacances de Pâques, puisque chez nous les
asperges sauvages poussent dans les collines entre fin mars et
mi-avril. Mon père n'avait pas son pareil pour trouver dans les
buissons ces asperges, dont il rapportait de ses promenades de
grosses bottes. Nous n'étions pas les dernières, Aline et moi, pour
l'accompagner et parier avec lui pour savoir qui découvrirait la
première asperge. Nous revenions, bras et jambes griffés par les
buissons, où nous nous enfouissions sans beaucoup de précautions à
la recherche de ces minces tiges vertes si savoureuses. Des grosses
bottes que nous rapportions à notre mère il ne restait que deux
poignées de pousses qu'elle faisait revenir à petit feu dans de
l'huile d'olive coupée d'un peu d'eau salée et poivrée. Quand les
asperges étaient cuites, l'eau évaporée, maman versait autant d'oufs
battus que nous étions de personnes plus deux ou trois pour que les
gourmands puissent en reprendre. La brouillade était cuite sur un
très petit feu dans de l'huile d'olive, fouettée sans arrêt pour la
garder moelleuse. C'est la brouillade, avec celle de truffes, la
plus parfumée que je connaisse. Elle a la saveur des collines, le
goût de la promenade, les parfums des talus. Cette brouillade est
pour moi la madeleine de Proust, source de souvenirs
extraordinaires, de sorties agrémentées d'histoires, de vent et de
soleil.
"Jean Tamayo"
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