Publiée le 15 Janvier 2000
Peler soigneusement les panais. Les faire cuire dans de l'eau pendant
environ une heure. Les couper et, éventuellement, enlever les parties dures.
Les presser dans un torchon pour en extraire l'eau. Dans une bassine (ou
casserole) en cuivre non étamé, faire cuire le miel jusqu'à 120 °C
(c'est-à-dire au petit boulé). Bien écumer pendant la cuisson.
Ajouter les panais et cuire à feu moyen (que l'on doit diminuer en fin de
cuisson) en brassant constamment avec une spatule de bois. On peut arrêter
lorsque ne s'en échappe plus de vapeur. Ajouter les épices avant la fin de
la cuisson.
Étaler la pâte à environ un centimètre d'épaisseur sur une plaque à
pâtisserie ou une table de marbre. Laisser refroidir complètement, puis
détailler en petites bouchées que l'on peut également rouler.
Autre interprétation: ne bouillir les panais que quelques minutes dans
l'eau, puis veiller à ce qu'ils ne s'écrasent pas en cuisant dans le miel.
Les retirer du miel une fois la cuisson achevée, les rouler dans la poudre
d'épices et laisser refroidir. On aura l'illusion de manger du gingembre
confit plutôt qu'une pâte au gingembre.
500 g de panais paré
500 g de miel
3 ou 4 cuillerées à café de gingembre râpé
1 cuillerée à café de galanga râpé
1 cuillerée à café de poivre moulu
1/2 cuillerée à café de muscade râpée
COMMENTAIRE
Le panais, cette racine grossière habituellement caractéristique du régime
des pauvres, se trouve ici promu jusqu'aux drageoirs aristocratiques. C'est
peut-être que, comme l'écrivait Aldebrandin de Sienne, " Pasnayes sont
chaudes ou second degré et moystes ou premier [ ... ] et donent talent
d'user femme ", et que les grands personnages sont prêts à consommer tout ce
qui conforte ce talent. Les premiers mots de la recette - " por fere gisir o
femme " - étayent d'ailleurs cette interprétation.
C'est aussi que la racine de gingembre arrivait en Europe trop sèche pour
que l'on puisse confectionner à partir d'elle une confiserie tendre à
manger. On se sert donc d'une racine fraîche et tendre pour contrefaire le
gingembre. La principale fonction des épices de chambre étant de faire
digérer le repas qu'on vient de faire, et le gingembre étant
particulièrement indiqué pour cela, il importe de noter que le panais a le
même tempérament que lui, chaud et humide, et pouvait donc passer pour avoir
la même vertu digestive. D'autant qu'il est ici fortement aromatisé de
gingembre râpé.
De même qu'aujourd'hui le gingembre confit importé d'Extrême-Orient est
parfois pimenté pour être plus efficace, de même autrefois, avant que le
piment américain ne soit connu de l'Ancien Monde, on ajoutait à ce gingembre
contrefait les épices les plus fortes - les plus chaudes - que l'on connût :
poivre et " garingal ". Cette dernière, plus connue maintenant sous le nom
de galanga était comme le gingembre un rhizome, encore plus piquant et plus
dur lorsqu'il était bien sec, et que l'on râpait comme lui.
FETES GOURMANDES AU MOYEN-AGE Jean-Louis FLANDRIN & Carole LAMBERT
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